L’art du tatouage à Tahiti

Catégories : FETICHISMES au pluriel
il y a 12 ans

Les arts décoratifs étaient relativement peu développés à Tahiti et dans les iles de la Société. Les tapa (étoffes naturelles) étaient sobrement décorés avec des motifs végétaux, les sculptures étaient moins élaborées que celles des archipels voisins et les motifs de tatouages étaient très limités. En conséquence, les artistes d’aujourd’hui disposent de peu de modèles anciens pour leur inspiration. Il existe, au contraire, une riche documentation sur le tatouage marquisien, de sorte que les tatoueurs s’inspirent actuellement presque exclusivement de ce style.       Le tatouage des femmes

Presque tout le monde dans la société tahitienne était tatoué; en particulier les femmes. C’était pour elles une obligation, alors que pour les hommes, s’il est vrai que c’était recommandé, ce n’était pas obligatoire. Le premier tatouage que devait porter les jeunes filles dès leur jeune âge était consitué de motifs à l’intérieur du bras et indiquaient qu’elles étaient libérées des tabous concernant la nourriture. Jusque-là elle ne pouvaient accepter de nourriture que celle préparée par leur mère, et personne d’autre. Il n’existe aucune illustration de ces motifs, seulement quelques descriptions. Les jeunes filles étaient à nouveau tatouées lorsqu’elle atteignaient la puberté. Ces tatouages sont souvent décrits comme de larges bandes sur les fesses. Au fil des ans, des motifs plus petits, en forme d’arcs étaient ajoutés au-dessus. Les récits de explorateurs montrent que les jeunes femmes avaient coutume de relever leur jupe de tapa pour montrer par leurs tatouages qu’elles étaient en âge d’avoir des relations sexuelles. Elles faisaient cela bien souvent à l’attention des Européens qui en étaient pour le moins surpris, si ce n’est choqués, particulièrement les missionnaires!

"Les jeunes femmes sont plus tatouées que les hommes. Elles se font tatouer d’un côté, puis environ un an après, elles terminent le tatouage de l’autre côté. Pendant ce temps, elles sont considérées comme enfants. Elles ne sont considérées comme femmes que lorsque le tatouage est terminé." (Morrison 1935:221. Traduit de l’anglais).

Tatouage des fesses à Tahiti C’est aux illustrateurs des voyages du Capitaine Cook que l’on doit les premières reproductions des motifs de tatouages tahitiens. Sur un croquis de Parkinson, on peut voir les motifs typiques des tatouages féminins décrits par de nombreux explorateurs (voir illustration a droite).

On trouve dans le journal de l’un des hommes du Capitaine Cook la description suivante: "Ce matin, j’ai assisté au tatouage des fesses d’une fille d’environ 12 ans, qui s’est avéré, comme je le pressentais, très douloureux. C’est effectué avec un instrument d’environ 2 pouces de long comprenant environ 30 dents. Chaque coup de cet instrument provoque une incision sanglante et des centaines de coups sont appliqués à la minute. La patiente a supporté cela pendant environ un quart d’heure avec une résolution stoïque; mais la douleur est devenue ensuite trop forte pour être endurée paisiblement. Elle a commencé a se plaindre et bientôt a éclaté en fortes lamentations; semblant même s’evanouir, et faisant tout pour persuader le tatoueur d’arrêter; elle était pendant tout ce temps maintenue alongée par deux femmes qui tantôt la réprimandait, tantôt la battait, et tantôt la consolaient. Je m’affairais dans la maison adjacente avec Tomio; cela a duré environ une heure, et la séance de tatouage n’était toujours pas terminée lorsque je suis sorti. Il s’agissait du tatouage d’une seule fesse, l’autre ayant été faite quelques temps auparavant. Les motifs en arc sur les reins, auxquels ils accordent une grande valeur, n’étaient pas encore faits. Il parait que leur tatouage est encore plus douloureux que ce que j’ai vu." (Beaglehole 1962: I, 309. Traduit de l’anglais)    

  Le tatouage des hommes     Les hommes eux aussi étaient tatoués dans la société tahitienne, mais de façon moins systématique et c’était moins une obligation sociale que pour les femmes.  Les garçons étaient tatoués plus tard, généralement au début de leur adolescence. Leur premier tatouage était effectué au moment de leur supercision (une procédure similaire à la circoncision), par la même personne. Morrison rapporte que les tatouages ainsi que la supercision étaient effectués "par quelques hommes en particulier qui vivent en partie de ce travail et sont toujours bien payés pour leurs services." L’opération avait lieu sur un marae, qui est un temple de pierre en plein air. La supercision traditionnelle est toujours pratiquée dans les îles mais le tatouage ne fait plus partie du rite de passage à l’âge adulte.

Les tatouages des hommes consistaient autrefois tout d’abord en de larges motifs rectangulaires, souvent décrits comme de larges bandes horizontales, sur les côtés du torse et l’interieur des bras. Occasionnellement les mains aussi étaient tatouées avec une série de tout petits motifs géométriques, ressemblant aux lettres "x"  et "w". Les femmes portaient des marques similaires sur leurs mains ainsi que sur leurs pieds.    

Source: Texte de Tricia Allen, tatoueuse établie à Hawaii, spécialiste de la culture polynésienne.

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